L’Europe du rail cherche à moderniser le réseau

Le rail européen a pour objectif de décupler la part modale du ferroviaire d’ici à 2030, que ce soit du côté passagers (avec un appel lancé par 24 dirigeants du secteur pour un nouveau pacte ferroviaire), ou du côté du fret (avec la coalition Rail Freight Forward, pour contribuer à la stratégie de décarbonation de l’UE posée par le plan “Fit for 55”). Mais le problème découlant de cet objectif est le manque de modernité du réseau, et ses difficultés de financement.  

Lors du sommet européen du rail, qui s’est tenu le 21 février à Saint-Denis, Jean-Pierre Farandou a exposé clairement ses certitudes. Celui-ci a mis en avant le fait que l’Europe avait besoin du train pour lutter contre le réchauffement climatique, en poursuivant l’innovation. Mais cela nécessite en effet de nombreux financements. 

C’est d’ailleurs dans cette logique qu’a été lancé Europe’s Rail, nouvelle entreprise commune fédérant la R&D du secteur dans le cadre du programme de financement Horizon Europe. 

Un réseau à moderniser 

La France est aujourd’hui sujette à la vétusté de son infrastructure. Sa modernisation passerait d’après Carole Desnost, directrice Technologies, innovation et projets du groupe SNCF, par la mise en place de nouveaux systèmes de signalisation, à commencer par le Système européen de gestion du trafic ferroviaire (ERTMS), le regroupement de la gestion des 2.200 aiguillages dans 16 postes de commande centralisée du réseau (CCR) digitalisés, la numérisation du système de gestion de transport. 

Développer le transfrontalier 

L’Autorité de régulation des transports (ART) en a aussi profité pour partager son point de vue, selon lequel le manque de compatibilité des réseaux entre les pays est un frein important à l’introduction de la concurrence, et au développement des services longue distance, notamment les liaisons transfrontalières. En effet, aujourd’hui, cela nécessite des équipements spécifiques sur les trains, et souvent un changement de conducteur à la frontière. 

Sur ce point, une modification du programme de Réseau transeuropéen de transport (RTE-T) est actuellement en cours de négociations, à l’initiative de la Commission européenne dans le cadre du « Fit for 55 ». Celui-ci doit permettre l’interconnexion des neufs principaux axes continentaux avec la mise en place d’un réseau central d’ici 2030, puis étendu d’ici 2050. 

Un des gros axes d’amélioration en la matière est la mise en place de l’ERTMS pour remplacer la vingtaine de systèmes actuellement en service et améliorer l’interopérabilité. Celui-ci doit aussi permettre une augmentation de capacité sur les axes les plus denses, comme le Paris-Lyon où il doit être mis en place en 2025 et permettre le passage de trois trains supplémentaires par heure. 

Un secteur en manque d’attractivité 

L’attractivité est aussi un sujet important du secteur, puisqu’aujourd’hui, il est de plus en plus dur de recruter, notamment à cause du manque d’innovation. Par exemple, les agents au sol sont aujourd’hui contraints d’évoluer avec 20 kilos d’équipement par tous les temps pour le couplage des wagons de fret. Un problème qui pourrait être résolu en accélérant le déploiement de l’attelage automatique numérique (DAC). Cela permettrait notamment de réduire la pénibilité perçue du secteur par les acteurs externes. 

Jean-Pierre Farandou se veut en tout cas optimiste sur la capacité du secteur à innover et prédit un basculement à venir prochainement :  » Nous avons les solutions dans le ferroviaire, il faut juste les déployer. Ce qui revient au financement. Et puis, nous avons des solutions quasi prêtes. Je pense à la motorisation hybride, à la motorisation hydrogène ou au digital dans l’exploitation. C’est quasiment prêt et avec un dernier coup de rein sur l’innovation que l’on va faire à travers Europe’s rail en particulier, nous allons trouver toutes ces solutions innovantes qui nous permettront d’avoir cette ambition de modernité pour le ferroviaire. » 

1.500 milliards d’euros à trouver 

Comme le souligne le PDG de la SNCF, innover nécessite de pouvoir investir. Et sur ce point, Luc Lallemand, PDG de SNCF Réseau, n’a pas hésité à grossir le trait. « Nous sommes dans un business de pauvres » a-t-il ainsi déclaré, arguant que peu de sociétés ferroviaires s’avèrent véritablement rentables en Europe. Il estime donc qu’il faut « proposer aux Etats des solutions qui permettent à la fois de minimiser les coûts d’investissement, mais aussi de maximiser les trafics sans se tromper de cible ». 

Le patron de l’infrastructure ferroviaire française a aussi tenté de donner un aperçu de la nécessité « d’investissements tout à fait massifs dans les infrastructures ferroviaires et la modernisation ». En s’appuyant sur l’étude d’impact de la Commission européenne sur l’actualisation du RTE-T, parue en décembre dernier, il cite le chiffre de 1.500 milliards d’euros nécessaires pour les réseaux transeuropéens, soit 123.000 km sur les 220.000 km que compte le Vieux Continent. 

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